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17 novembre 2002, Forum-Meyrin

Au programme

La Clemenza di Tito

Wolfgang Amadeus MOZART

Ouverture

Concerto en mi mineur op. 64
pour violon et orchestre

Felix MENDELSSOHN

Allegro molto appassionato
Andante
Allegretto non troppo - Allegro molto vivace

Violon Aurélie BANZIGER

Symphonie N° 1 en Ut majeur op. 21

Ludwig van BEETHOVEN

Adagio molto - Allegro con brio
Andante cantabile con moto
Menuetto: Allegro molto e vivace
Finale: Adagio - Allegro molto e vivace

Direction Philippe GIRARD

A propos du programme

Wolfgang Amadeus MOZART, au soir de sa vie, est en train de terminer la composition de sa «Flûte enchantée». Il destine cet opéra au théâtre de son ami Schikaneder dans les faubourgs de Vienne. Le compositeur n’est plus en odeur de sainteté dans les milieux de la cour, ce sera donc dans un théâtre populaire qu’il tentera sa chance. Mais si la Vienne officielle lui fait la tête, il n’en va pas de même de la ville de Prague où Mozart a toujours été accueilli comme un héros. Ainsi, lorsqu’il s’agira d’organiser les festivités pour le couronnement comme roi de Bohème de l’empereur Léopold II, le Théâtre National de Prague et tous les amis de Mozart se tournent vers lui. On lui passe donc la commande d’une pièce dans l’ancien style seria, sur un livret déjà maintes fois traité, La «Clémence de Titus».

Nous sommes le 15 août et la création est fixée au 6 septembre. Il reste à peine trois semaines à Mozart pour composer un opéra entier. La tâche est écrasante. Et pourtant le miracle s’accomplit. Cette «Clémence de Titus», moins souvent montée aujourd’hui que la «Flûte enchantée» ou les «Noces de Figaro» recèle des trésors au moins aussi précieux que les œuvres les plus connues du maître. Pour s’en donner une idée, l’ouverture, dans un lumineux Do majeur, scintille de mille feux. Le puissant drame de jalousie, d’amour et de pardon se déploie déjà sous nos yeux. Mais au détour d’un motif, on reconnaît le tendre sourire d’un frère de Papageno.

Il est peu d’œuvres du répertoire qui développent autant de séduction que ce concerto en mi mineur de Félix MENDELSSOHN-BARTHOLDY. La passion toute intérieure qui l’habite, la fièvre qui l’anime en font un chef d’œuvre très particulier. Malgré ses apparences virtuoses et malgré surtout la tendance de trop nombreux interprètes d’en faire un faire-valoir, ce concerto demande surtout une lecture respectueuse et une sobriété de tous les instants. En effet, rien n’est plus dommageable à une musique aussi délicate que les excès de pathos, les intentions «romantiques» inutiles.

Comme si souvent dans la musique de ce grand compositeur, tout est dit entre les lignes. Mendelssohn est le musicien de l’apparente limpidité. Ecoutez le thème du finale de l’œuvre. Une ronde d’elfes et de lutins tout droits sortis du «Songe d’une nuit d’été» et pourtant, derrière la légèreté se profile une inquiétude, le vertige du temps qui file sans que rien ne puisse le retenir. La douce profondeur du mouvement lent esquisse quelques gestes vers cet infini inaccessible.

Mendelssohn, malade, n’assistera pas à la création de son concerto le 13 mars 1845. C’est seulement quelques années plus tard qu’il l’entendra sous l’archet d’un jeune violoniste prodigieux, Josef Joachim. Nous sommes le 3 octobre 1847. Le compositeur mourra le 4 novembre suivant.

Existe-t-il une musique plus unanimement célèbre que l’œuvre symphonique de Ludwig van BEETHOVEN ? Ces neuf symphonies ont été jouées et rejouées par tous les orchestres du monde et pourtant, même si on affiche la plus blasée des lassitudes, on se laisse emporter dès le premier instant par l’énergie féroce qui s’en dégage. La première symphonie du compositeur n’est pas exactement l’œuvre d’un débutant. Créée le 2 avril 1800, elle est écrite par un musicien déjà célèbre de 30 ans et que la surdité est encore loin d’inquiéter. Nous n’avons pas encore à faire ici au Beethoven torturé et solitaire que l’imagerie romantique se plaira à dépeindre.

Cette symphonie s’inscrit apparemment dans la grande tradition mozartienne et surtout haydnienne. Et pourtant, si nous écoutons avec des oreille neuves cette musique si connue, on est frappé par les innombrables hardiesses qui la caractérisent. Débuter une symphonie par un grand accord dissonant fit déjà bondir les auditeurs de sa création. Cette brutalité ensuite dans la répétition des motifs du premier mouvement manifeste de façon impitoyable la force vitale jaillissante avec laquelle le compositeur nous conduit. De même, dans le mouvement lent, apparemment si proche de la facture haydnienne, l’ostinato rythmique installé par les cordes puis les timbales annonce-t-il les déferlements à venir de l’œuvre du compositeur de Bonn. Et lorsque Beethoven parle de menuet à propos du troisième mouvement, nous savons que le compositeur invente ce scherzo explosif qui inspirera les pages les plus féroces des symphonies d’un Chostakovitch. Ecoutons encore les premières mesures du finale de l’œuvre. Montée hésitante, exploration par paliers des degrés successifs de la gamme de do avant de s’élancer dans ce thème bondissant qui nous conduira tout au long du dernier mouvement.

Ainsi, derrière une œuvre si célèbre, se cachent d’innombrables surprises pour qui sait écouter avec les oreilles de l’explorateur.

Ph.G.